Il dort et se confond à l’herbe,
au soleil.
Il dort, il rêve.
Il dort.
La terre le berce
Désir de chevauchées débridées
dans des paysages où la paix arc-en-ciel ensemence la vie en joie et en
couleurs.
Il rêve.
Un autre, pour le
réveiller ? lui murmure à l’oreille ses envies de galops dans des paysages
sans frontière. Invitation à hennir jusqu’à l’infini de la lumière.
Deux crinières flottant jusqu’au
bord du ciel, ivres de libertés.
Le rêve.
De l’autre côté de leur monde, un
peintre les observe.
Il s’identifie à son œuvre.
Il se rêve cheval, assoupi dans
une apothéose mystique de formes et de couleurs.
Rêveur rêvé engendré par le rêve.
Quelques lignes se déforment.
Prémisses d’angles interrompant la courbe, évasion.
Il faut sortir du cadre !
Il faut sortir du cadre !
Il faut vivre la
transcendance.
Les pigments explosent, irradient
la feuille.
Les dimensions s’imbriquent.
S’évader !
Ne plus entendre ces grondements
annonciateurs de ténèbres.
L’éclat, il faut l’éclat.
Mais bientôt, un autre éclat. La
main vaincue déposera la brosse.
Ce sera le grand silence du sang
versé.
Et là, sur le papier, couché,
toujours rêvant, le petit cheval dort.
Je le regarde. Quelle
lumière ! C’est doux comme un regard d’enfant émerveillé.
Mais, couché sur le flanc, son
image m’évoque alors un tout autre sommeil.
Dehors le vent souffle sur ma
nuit blanche sa vaine tentative de me masquer les grondements d’un monde au
bord de la rupture.
Rejouerons-nous encore cette
partition de cauchemar si souvent interprétée jusqu'à l’écœurement ?
Le petit cheval dort et se
confond à l’herbe…
Mon cœur à la fois lourd et ouvert
s’incline ; j’accueille.
Ma seule puissance est l’abandon,
la vacuité de l’amour dans le non agir.
Le petit cheval dort.
Paix arc-en-ciel de la lumière.
©Adamante Donsimoni (sacem)
23 février 2017
D'après une aquarelle de Franz Marc
Franz Marc "Chevaux rêvant" 1913 - Aquarelle
sur papier